L'histoire des collections
Le Musée d'ethnographie de Genève est né avec le 20e siècle. Ses collections ont en partie une histoire plus longue, remontant deux siècles plus tôt pour les plus anciennes d'entre elles. Les objets réunis dans ce musée ne nous parlent pas seulement de populations plus ou moins lointaines, mais aussi de notre propre histoire et de notre goût pour les objets des Autres.
1702 – Le cabinet de curiosités de la Bibliothèque publique
La Bibliothèque du Collège (dit aujourd'hui collège Calvin) devient publique en 1702. Vouée à la formation intellectuelle des élites genevoises et visitée par les voyageurs, elle rassemble dans un cabinet de curiosités les « merveilles » de l'art et de la nature qui lui sont offertes. Ces objets sont les premiers entrés dans les collections publiques genevoises. Ceux qui ont été conservés jusqu'à nos jours sont répartis par genre dans les musées actuels.
1818 - Le Musée académique
Installé à la Grand-Rue dans le bel hôtel particulier aujourd'hui occupé par la Société de Lecture, ce Musée est l'œuvre des patriciens scientifiques genevois qui enseignaient à l'Académie (aujourd'hui on dirait l'Université). Il hérite des objets du cabinet de curiosités de la Bibliothèque qui répondent à ses intérêts : les sciences naturelles, l'archéologie, l'histoire locale, la « statistique (c'est-à-dire l'étude) des peuples non civilisés ». A partir de 1863, il est animé par Hippolite Jean Gosse. Au milieu de nombreuses autres activités, Gosse va réorganiser les collections et renforcer l'intérêt pour ce que l'on commence à appeler l'ethnographie.
1870 – Le Musée historique genevois, dit aussi Salle des armures
Créé par le don de l'Etat à la Ville de Genève de la collection des anciennes armures, ce musée est installé dans « l'Ancien Arsenal », c'est-à-dire les actuelles Archives d'Etat de Genève. H.J. Gosse en est le conservateur. A la suite d'un agrandissement de ses locaux, le musée élargit ses collections au-delà de la Suisse et acquiert régulièrement des armes et des armures exotiques. 132 pièces viendront nourrir le MEG en 1901.
1872 – Le Musée archéologique
La construction de la nouvelle Université dans la Promenade des Bastions va permettre la création de deux musées issus du Musée académique : le Musée d'histoire naturelle, qui s'installe dans l'aile Jura, et le Musée archéologique, qui occupe le sous-sol de la nouvelle Bibliothèque publique. H.J. Gosse continue à être le conservateur du Musée archéologique. Le MEG sera directement issu de ce musée en 1901.
1876 – Le Musée des missions
Fondée en 1821, la Société des missions évangéliques de Genève finance principalement les missions organisées par ses homologues de Bâle et de Paris. En 1876, elle crée, dans le bâtiment aujourd'hui disparu de la « Salle de la Réformation », en face du Jardin anglais, un musée dont les collections sont constituées par les envois des missionnaires œuvrant de par le monde. Grâce à l'entregent d'Eugène Pittard, les collections de ce musée seront données à la Ville en 1901, au moment de la création du MEG.
1884 – Le Musée Ariana
Créé par l'amateur d'art genevois Gustave Revilliod, le Musée Ariana est un palais dédié au Arts décoratifs, qui fait la part belle au goût exotique de son temps. Le musée et ses collections sont légués à la Ville de Genève en 1890. Une réorganisation effectuée à la fin des années 1930 provoquera le transfert de nombreux objets vers le MEG.
1885 – Le Musée des arts décoratifs
Décidé en 1876, destiné à l'ensemble des branches des Arts décoratifs, ce musée attendra près de dix ans sa création au sein de l'Ecole d'horlogerie. Le mouvement de renouveau esthétique par des motifs et des techniques d'inspiration exotique y acheminera des objets plus tard transmis au MEG.
1901 – Le Musée ethnographique de Mon-Repos
Au tournant du siècle, l'ensemble des collections publiques genevoises est réorganisé dans la perspective de la création du Musée d'art et d'histoire, inauguré en 1910. C'est à cette occasion que le MEG, appelé à l'époque Musée ethnographique, prend forme.
Séparées des collections archéologiques, enrichies de dons de particuliers et du Musée des missions, les collections ethnographiques de la Ville de Genève sont installées en 1901 dans la Villa Plantamour du parc Mon-Repos, au bord du lac Léman.
Dans un premier temps, la villa sert d'annexe aux musées municipaux et l'ethnographie partage d'abord les locaux avec des tableaux. L'installation initiale est néanmoins conçue avec soin comme une invitation au voyage encore fortement imprégnée d'exotisme.
En 1910, l'espace entier revient à l'ethnographie. Jusqu'alors simple membre de la commission du Musée archéologique, Eugène Pittard devient conservateur, et obtiendra le titre de directeur en 1937. Il va insuffler à l'institution des ambitions à la fois plus scientifiques et plus pédagogiques, répondant à son propre idéal humaniste.
Dans l'Entre-deux-guerres, la proximité avec le siège de la Société des Nations, installé au Palais Wilson, et l'engagement personnel de Pittard favoriseront les liens entre les deux institutions et le rayonnement du jeune musée.
1941 - Le Musée d'ethnographie au Boulevard Carl-Vogt
Le dynamisme d'Eugène Pittard vaut aux collections dont il s'occupe un accroissement rapide. L'organisation d'expositions temporaires rend plus criant encore le manque d'espace. A force d'insistance, Pittard obtient le déménagement de l'institution dans un bâtiment plus grand, sinon plus adapté, puisqu'il s'agit d'une ancienne école. Pittard saura néanmoins y pratiquer une muséographie qu'il cherchera à rendre toujours plus pédagogique. En 1952, le long règne de ce directeur légendaire, alors âgé de 85 ans, prendra fin, et sa succession reviendra à son ancienne assistante, Marguerite Löbsiger-Dellenbach.
1976 - L'annexe de Conches
Acquise par la Ville de Genève en 1972, inaugurée quatre ans plus tard comme annexe du Musée d'ethnographie, la villa sise au chemin Calandrini dans la localité de Conches, aux portes de Genève, a été durant trente-sept ans le siège d'expositions temporaires principalement consacrées au domaine européen, autour de la collection Georges Amoudruz. Le MEG Conches a fermé ses portes en 2013.
2014 - Un nouveau bâtiment pour le MEG
Après de nombreux rêves de construire ailleurs un musée plus grand, Genève a finalement décidé d'offrir à ses collections tricentenaires un bâtiment moderne édifié au boulevard Carl-Vogt. La dimension patrimoniale de ces collections s'est imposée. Témoignant de traditions toujours vivantes ou d'états de sociétés révolus, les objets sont devenus des archives d'une diversité humaine elle-même prise dans le mouvement de l'histoire.