Les restes humains au MEG
Un regard critique sur les pratiques muséales passées et présentes
Iris Terradura
Il est parfois difficile de deviner qu’un objet exposé dans une vitrine du MEG contient des restes humains. Et pourtant, le Musée en conserve plusieurs dizaines qui proviennent de différentes régions du monde (comme un crâne humain surmodelé de Papouasie-Nouvelle-Guinée ou un tambour à deux calottes crâniennes utilisé lors de rituels du bouddhisme tantrique au Tibet). Ces pièces peuvent être qualifiées d’artefacts, car elles ont toutes été modifiées de manière culturelle avant d’entrer dans les collections de l’institution. Toutefois, un vestige humain n’est pas un objet culturel comme un autre et il est nettement plus enclin à faire l’objet d’une demande de restitution ou de propriété. Il s’agit ici de discuter de la provenance des objets sensibles de la collection Asie. En effet, que ces pièces soient montrées ou non, leur présence est toujours plus questionnée. En 2022, l’institution a pris la décision de ne plus exposer aucun objet constitué de restes humains, à moins d’avoir le consentement de l’État ou de la communauté concernée. Des procédures pour entrer en contact avec ces derniers ont été lancées et les objets pour lesquels le consentement n’a pas été obtenu ont été retirés de l’exposition permanente, ainsi que leurs photos du catalogue des collections en ligne. Un nouveau parcours a été proposé dans l’exposition permanente du MEG pour documenter les objets en question, ainsi que pour expliquer les raisons de ces retraits.
À travers une critique de l’histoire des collections, l’institution souhaite élucider la biographie de l’objet, de sa création jusqu’à son arrivée au musée. Les changements de propriétaire constituent un des aspects centraux dans cette enquête. Néanmoins, il convient également de réaliser au mieux une reconstitution des événements et des contextes historiques. Cette dernière permet d’appréhender les conditions politiques, sociales, environnementales et culturelles dans lesquelles ont eu lieu les diverses acquisitions. Bien évidemment, chaque cas est différent, mais en posant des questions sur les modalités de son acquisition (quoi ? qui ? où ? comment ?), il est possible d’informer sur les changements de propriétaire de la pièce et de questionner sa place au sein de collections ethnographiques.